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Le cadavre d'un pays

Le scénario est le patria de la léthargie ; sur lui, une grande masse circule tête vers le bas au bénéfice de ceux qui détiennent le pouvoir. Ce n'est pas Wells, c'est le Chili. Les corps qui descendaient par le Mapocho vers le précipice de la mémoire furent la métaphore du pays qui venait, le déprojet national, dérégularisation de symboles, surtout l'échec individuel de chaque chilienne s'effondrant sur son propre territoire. C'est l'image que sauve et adopte le poète José Ángel Cuevas dans son Lyrisme de l'Edifice 201, comme dans toute sa poésie antérieure.

Ce titre qui pourrait bien signaler la baraque où demeure prisonnier l'esprit, dans quelque Goulag folklorique sous le silence duquel le pays se dissimule et se décompose au profit des dépeceurs et des commerçants. Le silence est une arme pratique pour eux. Ici, apparemment, rien ne se passe sinon la démocratie, mot secret qui à la fois cache le chef mapuche meurt en prison du sud, et c'est le même qui empêche le poète Eduardo Embry de parler lors d'une cérémonie des socialistes chiliens à Londres (qui dit ses petits poèmes, pas plus, ceux qui parlent de la lutte contre la dictature.Parce que du Chili d'aujourd'hui, compagnon, on ne peut pas parler, ne sois pas un leader négatif, on sait déjà, c'est antidémocratique) À ce Chili se réfère Pepe Cuevas. C'est le pays qui montre, au contraire, dans un livre publié à Buenos Aires pour ne pas attenter, donc, contre l'intouchable concept de gouvernement du peuple, un jour enfanté par les Grecs.

Celui qui observe le territoire est un citoyen ordinaire. Le poète, tel Parra, est descendu de l'Olympe, ou comme l'auteur aime à se présenter, il s'agit d'un "ex poète". De l'Edifice 201, un bloc de population ouvrière de sécurité a établi sa ziggourat, voit circuler une existence qui lui est tout à fait étrangère "Je voyais passer des hordes de bureaucrates et dépendants (comme moi)/ fumeurs. Je suis né dans le pauvre Chili/ le sanguinolant Chili/ je mangeais pizza et regardais/des soirées entières l'ébullition des rues depuis mon travail".Je suis né pauvre au Chili / le sanguinolant Chili/ je mangeais de la pizza et regardais / des après-midi entières l'agitation de la rue depuis mon travail. "

Ce ne sont pas des temps pour les poètes et les héros. Ceux-ci avaient besoin d'un étage éthique et d'exiger de tel système de valeurs sans savoir que résulterait maintenant une simple stupidité, une idiotie. Le poète n'est pas ni ne pourrait être un illuminé, "mais au contraire / c'est l'émissaire d'un pays vaincu / impayé / bègue / une personne de classe moyenne / qu'aucune femme ne voudrait comme un amant (...) En ce qui concerne votre travail / le poète dit qu'il n'a pas la prétention / d'écrire quelque chose de nouveau.Il dit que si quelque chose se passe bien / c'est pure coïncidence." Pas plus que les autres, ceux désignés pour ce rôle historique, ne le sont maintenant. Les mêmes communistes du quartier, puis persécuté, "sont devenus les fous quand nous sommes entrés/ le restaurant où ils mangeaient./ Baissèrent les yeux / et ne nous ont pas même conviés à boire un verre de piquette."

Son esthétique de la défaite n'est pas seulement une simple plainte. Dans sa description qu'il fait du milieu, comme s'il observait la misère à travers un périscope, nous rencontrons la plus profonde ironie, quand ce n'est pas la moquerie directe, de cette prétention de «projet national» menée par la Coalition. Pas moins stupide que la pro-fasciste "Argentine puissance" du péronisme tardif ou autre slogans utilisés par l'histoire. Le discours politique du pouvoir a toujours été, en outre, un moyen pour remplacer l'absence de sens.

Le message que communique le discours de José Ángel Cuevas est d'ordre public. Son langage est celui d'un chilien de Santiago qui revient autour et qui, cependant, est jour après jour surpris par l'absurdité quotidienne. C'est le parlé « des exonérés, des faibles, des laids, de ceux sur lesquels a rebondi la vague, des malades, des aveugles, des édentés, des passés de mode", c'est à dire les déracinés des trottoirs urbains, de ceux qui n'ont pas sautés dans le train des politiciens et n'ont trouvé que la misère après la répartition des postes et des avantages. Parce qu'en dehors de la meute, dans la métropole, tout autre meurt de faim. Il s'agit, en définitive, du même discours qu'avec force reprend Restaurant Chili, son dernier recueil de poèmes.

Et comme l'indique bien Raul Zurita dans l'anthologie mencionnée, sa poésie a une profonde signification morale. Cuevas signale, indique, met le doigt sur la tête, là où ça fait le plus mal aux contremaîtres du capitalisme. Le bureau du poète, pour cet auteur, c'est précisément cela. Le dernier poème, portant le même titre, est une déclaration de principes : " Ils demandent que vous ne leurs parliez plus du passé / qu'un artiste doit produire des nouveautés (...) Non et Non / Le poème à un moment peut parfois conserver / caresser / souffler du vent sur le cadavre d'un pays."

Cuevas est un poète nécessaire, indispensable dans le décompte du discours national lyrique. C'est pourquoi de jeunes rédacteurs de Buenos Aires l'ont collecté au bénéfice des lecteurs de notre langue. Son œuvre, au-delà de la signification politique immédiate, est mue par son intensité, sa précision linguistique, son sens d'ouverture et, après tout, un style qui lui est propre et a été intensément capté et défendu par ses partisans.

Biographie résumée

José Ángel Cuevas est né à Santiago en 1944. Professeur de philosophie et membre reconnu de la première promotion des années 80, il a publié Effets personnels et domaines publiques (1979), Introduction à Santiago (1982), Contravies (1983), Chansons rock pour chiliens (1987), Adieu les foules (Anthologie, 1989), 30 poèmes de l'ex-poète (1992), Projet de pays (1994) Poésie de la Commission liquidatrice (1997), Journal de la ville en flammes (1998), Maxim, lettre au vieux rockers (2000), Restaurant Chili (Anthologie, 2005) et Lyrique 201 (2007)

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